Chez QUARTUS, nous défendons une ville sensible, ancrée dans une histoire et un territoire. Au cœur de nos projets ? Un professionnel du sensoriel et de l’émotionnel : l’architecte. Regards croisés avec Emmanuel LAUNIAU, Président de QUARTUS, et l’architecte Matthieu POITEVIN, Fondateur de l’agence Caractère Spécial.
Que penser de la standardisation croissante de la production immobilière ?
Emmanuel Launiau : Dans bien des domaines, la standardisation a été une avancée. Mais voulons-nous tous les mêmes logements, les mêmes bureaux, les mêmes rues ? Avec les équipes QUARTUS, nous croyons en une ville vivante et contextuelle. Réaliser un projet immobilier devrait se résumer à des questions simples : est-ce que j’ai envie d’habiter dans les logements que je produis ? Est-ce que je peux en être fier ?
Matthieu Poitevin : Par crainte du risque, nous avons confondu ville confortable et ville conformiste. Or, la ville est un écosystème complexe : sortons de l’immeuble de rapport et construisons l’immeuble de récit, celui qui privilégiera l’humanisme onirique.
Comment expliquer cet état de fait, quand chaque projet devrait exister d’abord en relation avec son contexte ?
MP : Le jacobinisme français y est pour beaucoup. Souvent, les mêmes grandes agences d’architecture parisiennes trustent les commandes emblématiques, et construisent indifféremment de Nice à Lille.
EL : Le site c’est le projet. C’est à partir du site, de ce que nous pouvons en « garder », que nous construisons une situation. Cette approche contextuelle permet de s’interroger dès le départ sur ce qui justifie un projet, une architecture. Quels sont ses fondements culturels, quel rapport établit le projet avec la société ? Qu’est-ce qui le rend durable ?
Que change concrètement cette attention au terrain ?
EL : Elle permet de contribuer à la continuité historique d’une esthétique urbaine. C’est ce que nous faisons en privilégiant la réhabilitation de l’existant, en pensant un bâti évolutif. C’est ainsi que nous avons transformé, à Paris, la friche hospitalière Saint-Vincent-de-Paul en un écoquartier respectueux du bâtiment existant, inclusif,
et écologique.
MP : C’est la réflexion architecturale qui « crée » l’envie d’habiter et qui, en jouant avec l’imaginaire, crée des « immeubles de récit ». Pour cela, rien ne remplace la connaissance de l’environnement social, politique, culturel d’un projet.
Quelle place occupe aujourd’hui l’architecte dans les projets ?
MP : Aujourd’hui, les promoteurs sont les producteurs des villes. Beaucoup ont compris que la réflexion architecturale est source de plaisir et de bien être dans les logements. C’est à « donner envie d’habiter » que doit servir un architecte.
EL : L’architecte est un partenaire vital, car l’architecture est au centre de notre exigence. Nous mettons en place une équipe dédiée en interne pour soutenir la conception architecturale des projets, valoriser l’identité des lieux, l’habitabilité, le design des espaces communs, les choix de matériaux, la qualité des finitions, le rendu esthétique. C’est ainsi qu’ensemble, nous nous mettons au service des projets que nous conduisons.
Quels sont les axes d’amélioration pour aller vers une pratique écologique de vos métiers ?
MP : Le choix de la réhabilitation plutôt que de la construction neuve relève de l’évidence. Ce n’est pas le choix de la facilité mais c’est crucial pour réduire le bilan carbone des projets et limiter l’artificialisation des sols… tout en réduisant les déchets de notre secteur.
EL : Matthieu a raison. L’économie des ressources est aussi importante que la nature des ressources utilisées. Chez QUARTUS, nous travaillons beaucoup sur les matériaux : la terre crue bien sûr avec laquelle nous sommes très mobilisés à travers Cycle Terre, mais aussi la paille, le béton de chanvre, la pierre, le béton bas carbone. De plus, les enjeux de réemploi, de réversibilité des bâtiments sont centraux : le bâtiment réellement écologique, c’est celui qui peut avoir plusieurs vies et qui a pensé à sa déconstruction avant d’être construit.
Produire un habitat contextualisé et écologique, certes… et les habitants dans tout ça ?
EL : Nous visons avant tout un habitat… habité ! Pour éviter le logement « subi », nous misons chez QUARTUS depuis 2018 sur la co-création. Les futurs résidents peuvent intervenir en amont pour modifier la physionomie de leur logement et ses aménagements, en lien avec l’architecte et les équipes techniques.
MP : L’art de l’architecte consiste à susciter la part de rêve qui va donner aux ouvrages leur dimension humaine. Par ailleurs, le caractère écologique d’un projet ou d’un logement, ce lien avec la nature que l’on vient restaurer, est aussi un gain de qualité de vie pour les habitants.
Selon vous, l’urbanisme est-il un humanisme ?
MP : Faire l’urbanisme, c’est permettre aux villes de se développer depuis leurs agglomérations. Un récif se développe en continuant ce qui le constitue : dès que sa nature même trouve une limite, il dépérit. La ville n’est pas autre chose.
EL : Nous avons un devoir collectif de redonner le goût d’habiter la ville : 75% des Français y vivent, c’est là que se trouvent les solutions. Pour cela, il faut innover. Mais prenons garde à ne pas tout sacrifier aux normes et aux critères de performances. La ville de demain doit être sensible et faite avec bon sens. N’oublions jamais que les centres-villes dans lesquels nous aimons tous vivre ne pourraient plus être construits avec les PLU d’aujourd’hui. Chacun, à sa place, nous devons travailler ensemble avec convictions et beaucoup d’humilité.
— Retrouvez l’article, Quartus « Pas de ville désirable sans architectes ! » dans Archistorm 116 daté septembre – octobre 2022
Retrouvez les travaux de QUARTUS dans le prochain tiré à part Archistorm novembre-décembre 2022.
Visuel à la une : Rue Gachet, Marseille Architecte : Matthieu Poitevin, agence Caractère Spécial © Yam-Studio