Thomas Bourdon et Nicolas Croixmarie, architectes et urbanistes, se sont formés ensemble à l’école d’architecture de Versailles et à l’Université d’Illinois (à Chicago et à Champaign). Thomas Bourdon a complété sa formation à l’École nationale supérieure de paysage de Versailles (ENSP Versailles).

Leur travail aborde la réhabilitation, où ils s’inscrivent dans un héritage à adapter, valoriser et transmettre. Il concerne également la construction neuve où, premiers architectes d’un édifice, ils formalisent un propos fort et lisible, un ouvrage capable d’évoluer dans le futur.

L’agence croixmariebourdon architectes associés s’est d’abord fait connaître par ses opérations parisiennes de logements sociaux en neuf et en réhabilitation patrimoniale. Elle a par la suite constitué une expertise élargie et diversifiée : immeuble de bureaux en bois à Malakoff (2019), marché, parking et espaces publics à Courbevoie (2020), transformation de bureaux en logements à Pantin (2020), réhabilitation d’une école à Chevilly-Larue (2022) et aménagement d’un îlot de fraîcheur à Malakoff (2023), réalisations qui ont reçu plusieurs prix et distinctions.

À l’occasion de sa vingt et unième année, l’équipe de croixmariebourdon architectes associés s’est lancée, en juillet 2023, dans un parcours prospectif d’un an, associant formation et création, pour se projeter collectivement sur les vingt prochaines années.

© croixmariebourdon architectes associés – S.Crouzet-Bourdon

Retour d’expérience : croixmariebourdon en Casamance

L’agence croixmariebourdon architectes associés a exercé jusque-là exclusivement en France. À l’échelle francilienne, pour le logement collectif (social ou privé), et à l’échelle nationale, pour les équipements (halles de marché, logistique, tertiaire, scolaire).

Lorsque l’association Asseept-Casamance nous a proposé de nous lancer ensemble dans un projet au sud du Sénégal, nous avons saisi l’occasion de découvrir d’autres territoires, d’autres modes de travail, où proposer une approche contextuelle et bioclimatique avec des repères différents. Nous y avons vu une possibilité d’établir, avec notre équipe et de nouveaux partenaires, un échange de savoirs où chacun apporte sa culture, ses moyens et ses besoins au service d’un projet commun.

Ce sont ainsi l’engagement et la curiosité, plutôt qu’une quête de développement international, qui nous ont conduits à construire à l’étranger.

Nous avons pu y mesurer les persistances et les différences de l’exercice de notre profession. Nous y avons apprécié une écoute et une disponibilité fortes de nos partenaires locaux (artisans, entreprises, chambres consulaires, communauté éducative), qui ont pris le temps de nous apprendre leur pays et d’expérimenter de nouvelles méthodes.

Nous avons aussi constaté le manque d’acteurs locaux. En premier lieu, les urbanistes et les architectes, pour accompagner les décideurs et les habitants sur les enjeux de développement urbain et de lutte contre le changement climatique.

Loin du développement effréné des capitales, les sujets existent et sont passionnants : loger l’ensemble des classes sociales, valoriser les centres-villes, éviter l’étalement urbain et la déforestation… Mais les niveaux de vie sont tellement différents qu’une agence basée en France, comme la nôtre, ne semble pas pouvoir y intervenir dans un cadre économiquement viable.

C’est ainsi dans le cadre du mécénat que l’équipe de croixmariebourdon s’est mobilisée pendant cinq années d’études et de chantier, dans un exercice complexe et enrichissant.

Dans un premier temps, les études ont privilégié un projet fonctionnel, répondant de façon simple et forte aux enjeux : usage, climat, pérennité, entretien. Nous avons questionné nos modes de représentation en dessinant un « projet-notice », à appréhender comme un meuble en kit. Cette étape a permis de concevoir, et de partager à distance, un projet abordable et adaptable.

Dans un deuxième temps, avec l’entreprise choisie sur place, nous avons questionné les mises en œuvre pour intégrer les ressources et les moyens locaux. Le bâtiment était initialement conçu en parpaings de ciment pour leur facilité de mise en œuvre et leur image qualitative. Le projet a pu évoluer pour valoriser les ressources présentes. La terre crue locale a remplacé le parpaing importé. Ce « projet localisé » a surtout gagné une nouvelle dimension pédagogique, par la formation d’ouvriers locaux en collaboration avec les chambres consulaires locales et françaises.

Enfin, durant le chantier, nous nous sommes appuyés sur nos partenaires locaux (l’entreprise, la chambre des métiers, la communauté éducative) avec lesquels nous avons établi une confiance solide. Nous avons réalisé un « suivi de loin », fait de séjours annuels et de visites hebdomadaires en visio. Il a fallu pour cela clarifier et hiérarchiser les attentes en permanence pour permettre les arbitrages sans perdre la force du projet ni la qualité de réalisation.

La simplicité du projet, la radicalité des mises en œuvre nous ont permis d’aboutir à un bâtiment d’une grande qualité architecturale, fonctionnelle et bioclimatique, dans le cadre d’un projet participatif à forte valeur humaine. Il a reçu pour cela une mention lors du Palmarès AFEX 2023. C’est aujourd’hui un « bâtiment-référence », qui fait la fierté de la communauté éducative comme des artisans et contribue au rayonnement local.

Pour l’agence croixmariebourdon, ce projet a formalisé une évolution d’approche du projet qui s’appuie désormais sur la force du propos architectural, sur la qualité des partenariats et sur le plaisir de travailler ensemble. Nous avons aujourd’hui envie de poursuivre notre engagement à l’étranger, et notamment en Afrique. Reste encore à trouver l’organisation appropriée pour parvenir à construire un projet local, dans l’échange, sans renoncer à notre engagement architectural, durable et social.

plan croixmariebourdon architectes associés

Présentation du projet : Un Éco-Lycée en Casamance

Guiré-Yéro-Bocar est une commune rurale de Casamance, région agricole du sud du Sénégal. La nouvelle bibliothèque accueille un fonds de 15 000 manuels scolaires et ouvrages de littérature collectés dans des collèges et lycées français.

Cette construction amorce le réaménagement du site du collège-lycée, qui s’est vu doter par la commune d’une emprise de 8 ha destinée à accueillir, au sein d’un campus arboré, des bâtiments pédagogiques supplémentaires et des équipements sportifs. La nouvelle emprise comprend aussi des surfaces de savane, de terres agricoles et une ancienne carrière, qui offrent l’opportunité d’un projet écologique porté par les associations d’élèves. Dans une mobilisation collective contre la déforestation et le changement climatique, il s’agit de constituer une friche pédagogique et un espace de reforestation expérimentale, supports d’activités éducatives et écocitoyennes.

Cette démarche s’inscrit dans le cadre d’une convention de projet « Campus Vert » signée entre les élèves, la communauté éducative, les partenaires locaux et l’association Asseept-Casamance. Il s’agit de former, dans une démarche collaborative et avec l’accompagnement bénévole de l’agence croixmariebourdon architectes associés, un projet d’aménagement durable du site à horizon 2028.

Une nouvelle ombre portée

Le lycée actuel s’organise autour d’une cour rectangulaire délimitée par les édifices abritant les classes. Cette cour se structure autour de plusieurs polarités : le majestueux manguier central qui offre son ombre à la vie sociale du lycée, celui de l’entrée (accueil, restauration), le puits (l’accès à l’eau).

De forme circulaire, le bâtiment crée une nouvelle polarité. Il est composé d’un volume plein, abritant les livres, et d’une périphérie ouverte sur l’extérieur accueillant les espaces de lecture pour les élèves, seuls ou en groupe. La construction rayonnante, qui profite de deux accès transversaux, forme un pivot au cœur du futur Campus Vert et annonce les nouveaux équipements pédagogiques et sportifs.

Visuel à la une : © croixmariebourdon architectes associés – S.Crouzet-Bourdon

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